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sábado, diciembre 10, 2011

La faim de maría Bernabé

Ecrit par Christine Bini 09.12.11
http://www.lacauselitteraire.fr/


La Faim de María Bernabé (Muerta de hambre, 2005), roman traduit de l’espagnol (Argentine) par Isabelle Gugnon, éditions La Dernière Goutte, octobre 2011, 224 p., 18 €.
Ecrivain(s): Fernanda Garcia Lao


MaríaBernabéCastelar (d’une traite, comme elle le précise dans l’avertissement liminaire) est obèse. Elle mange, ingurgite, se shoote à la nourriture, dans le but avoué de se faire exploser. « Mon corps est mon discours », dit-elle. À sa façon, elle lutte. Contre une vie de famille aisée et délétère, père adultère et mère alcoolique. La faim inextinguible de María est l’aveu du malheur, qui, dans le livre de Fernanda García Lao, passe par l’ironie et la farce.
Durant son enfance, María est obsédée par ses deux petites voisines, des jumelles rousses et parfaites, reines de beauté. Sont-elles ses sœurs ? Ou simplement les filles de la maîtresse de son père ? Qui, curieusement, est toujours appelée « Mother ». L’exploration de leur maison réserve quelques étonnements, et dans l’écriture, on glisse insensiblement de la « poupée » de chair que l’on exhibe sur les podiums à la poupée de celluloïd, « dure et orthopédique », qui se met à chanter lorsqu’on lui tape dessus. María, elle, n’est jamais lauréate des concours auxquels elle participe, concours réservés à sa « catégorie », durant lesquels elle croise la route d’enfants difformes, désignés dans le texte de manière géométrique, « Cercle », « Losange »…
Les événements s’accélèrent, étranges mais plausibles : installation de la maîtresse et de ses jumelles au domicile familial, rencontre amoureuse et charnelle avec un certain Emilio, apparition d’un diététicien, internement psychiatrique. À ce stade, le lecteur tique. La forme de la narration adopte le cheminement d’un « processus digestif, partant du début – s’approcher d’une assiette – pour arriver à la fin – se débarrasser des aliments ingérés ». Mais les différents chapitres mêlent le passé et le présent dans la conjugaison, et également dans la diégèse. Tout semble tourner autour de la date du 25, ou du 26, on ne sait pas encore pourquoi, mais on n’a pas oublié l’incise de la page 73. Quelques petits repères nous ramènent sur un chemin psychologique, « à l’évidence, les règles avaient changé en mon absence. Elles évoluaient toujours sans la moindre explication. Et tout le monde paraissait s’y adapter naturellement. Tout le monde, sauf moi. L’humanité d’un côté et moi, de l’autre », à moins qu’il ne soit symbolique. Ou métaphorique.
Les situations sont reprises et chamboulées, parfois en paragraphes entiers et similaires à ceux des premiers chapitres. Une voie de déchiffrement s’entrouvre peut-être : on a été averti que la structure suivait le processus digestif, que l’on partait de l’assiette pour arriver à… la défécation, sans doute. Nous voici arrivés, peut-être, avec ce grand brassage de situations, au moment de la digestion elle-même : nous sommes dans l’estomac, les sucs gastriques sont à l’œuvre, tout est malaxé, redistribué. On a vu passer les plats. On a mâché et dégluti. À présent, on digère, on concentre, on transmue. On s’inquiète un peu, aussi, au sujet du chapitre à venir. Qui se conclut, ou presque, sur « Il n’est resté aucun vestige de ma vie. Tout a été liquidé comme pendant un grand repas en plein air. La table est vide, la nappe est sale, les chaises sont en désordre. Il n’y a aucune trace des invités ». La vie a défilé, organique et sensuelle, cruelle et violente. C’est bien à un parcours que nous avons assisté. Un parcours dont la solitude est la tache aveugle, ce fameux point qu’il convient de découvrir au centre du labyrinthe. La vie, la mort, l’ingestion et la digestion, voilà les méandres que nous avons suivis.
La partie finale, intitulée « Mon Œuvre » est une tentative de retournements multiples, en vortex. Qui est qui ? Qu’est-ce qui est vrai ? Inventé ? Et à quoi bon se poser ces questions pour un roman ? Même si l’on trouve dans ces ultimes pages une interprétation crédible à l’exclamation « she is a cross-eyed girl » de Mother et une explication tout aussi plausible à la réflexion de María Bernabé : « J’ai décidé que tu n’existais pas. Je vais cesser de t’évoquer ». La lecture d’un tel texte n’est pas aisée. On peut y voir, tout simplement, le mal-être existentiel d’un personnage féminin. C’est sans doute un peu court. De même que la seule explication par la schizophrénie. Les allusions à la surdité, à un bandeau sur l’œil, le remplacement d’une « maman » inapte à son rôle par une « Mother » yankee prenant soin de ses jolies petites jumelles, la trahison du père, une phalange coupée et que l’on cherche à genoux, tout cela peut faire basculer l’interprétation, également, vers le politique. Peut-être.

Christine Bini

A propos de l'écrivain
Fernanda Garcia Lao
Fernanda García Lao est née en 1966 à Mendoza en Argentine. Contrainte de s’exiler à Madrid avec sa famille en 1976, elle retourne dans son pays d’origine en 1993 et s’installe à Buenos Aires. Comédienne et dramaturge, elle est l’auteur de plusieurs pièces de théâtre ainsi que de nombreuses nouvelles. Elle a également publié plusieurs romans, dont La faim de María Bernabé qui a obtenu, en Argentine, le prix du Fonds national des arts.

A propos du rédacteur
Christine Bini
Rédactrice en chef
Responsable du comité de lecture
 
Christine Bini est agrégée d’espagnol, responsable éditoriale du site-expert « La Clé des Langues » (DGESCO) à l’École Normale Supérieure de Lyon, et professeur en lycée.
Elle s’intéresse avant tout à la littérature d’imagination.
Elle lit, et considère son activité d’essayiste comme le prolongement de son plaisir de lectrice.
Dernier ouvrage publié : Le Marbre et la Brume, l’univers littéraire de Georges-Olivier Châteaureynaud, Alphée/Jean-Paul Bertrand, 2010.

lunes, diciembre 05, 2011

Le ventre l’emportera

Par Éric Bonnargent
anagnoste.blogspot.com

(click dans le titre pour aller a l'anagnoste.blogspot.com)

« Instructions pour être malheureux :
Imaginez que vous êtes quelqu’un, puis attendez. »

FGL



(Imagen Lucian Freud)

L’art de l’exergue est un art ignoré auquel le lecteur ingrat prend plaisir sans vraiment y prêter attention. L’importance de cet art est certes secondaire, mais il faut un véritable talent pour choisir des citations pertinentes qui, l’air de rien, agrémentent la lecture. Si William Vollmann reste sans doute le maître incontesté en ce domaine, Fernanda García Lao est une sérieuse rivale. Au début des neufs chapitres qui composent La Faim de María Bernabé, le lecteur trouvera des phrases inattendues de Witold Gombrowicz, de James Joyce ou encore de Bruno Schulz. Aussi plaisant soit-il, le choix de ces citations ne suffirait cependant pas à me faire parler de ce livre, mais La Faim de María Bernabé est un roman aussi original que profond et il faut une nouvelle fois saluer le travail des Éditions de la Dernière Goutte qui nous permettent de découvrir une écrivaine jusque-là jamais traduite en français.

Née en 1966 en Argentine, Fernanda García Lao a écrit de nombreuses pièces de théâtre et plusieurs romans. Récompensé en 2004 par le Prix du Fonds National des Arts, La Faim de María Bernabé se présente comme le journal d’une jeune fille « grosse et malheureuse ». Le sujet pourrait paraître banal s’il s’agissait d’un énième texte sur la boulimie transpirant le pathos ou l’impudeur. Soyez rassurés, c’est de tout autre chose qu’il s’agit et ce livre trouve plutôt un lien de parenté avec un roman comme Grande Ourse de Romain Verger. Car, là aussi, la nourriture et la folie sont intimement liées. María Bernabé n’a qu’une obsession : manger et manger encore afin de grossir et de grossir encore :


« J’ai un besoin désespéré de mâcher. Je ne pense qu’à broyer, je ne suis jamais satisfaite. Je ne dis jamais assez. Je veux toujours une bouchée de plus, je ferais des folies pour ça. Pourquoi me modérer si mon ventre peut contenir des kilos de matière. J’ai besoin de transformer ; mon seul outil est l’estomac ; les mains ont été créées pour être portées à la bouche et charrier des délices ou des immondices, peu importe. »


Bien entendu, la faim de María Bernabé comble une immense détresse affective. Entre une mère dépressive et alcoolique et un père qui a installé sa maîtresse, Mother, et ses filles, des jumelles, dans une maison voisine, María est livrée à elle-même. Et alors que les deux jumelles (ses sœurs ?) gagnent concours de beauté sur concours de beauté, María grossit et participe à des concours d’obésité. Elle se replie dans le confort de ses bourrelets et atteint les 120 kilos :


« Se bourrer de graisse est une façon de s’éloigner d’autrui. »


C’est pourtant la haine qui va l’emporter sur l’indifférence, la haine envers son entourage, envers son malheureux nutritionniste, mais surtout envers les jumelles et Mother qui, après l’internement puis le départ de sa mère, devient sa belle-mère. Cela donne lieu à des scènes irrésistibles, aussi drôles que pitoyables :


« Elle [Mother] souriait et j’étais nerveuse. Elle jouait crescendo. Sans penser à mon geste, j’ai levé la main pour lui flanquer une gifle, mais j’ai heurté le couvercle du piano. Elle a pouffé, mais quand le couvercle s’est rabattu d’un coup sec sur son petit doigt, son rire a fait place aux hurlements. Ses yeux se sont remplis de larmes, rivés en même temps que les miens sur ce qui restait de sa main mutilée. Le bout de doigt est tombé par terre. À présent, Mother était muette. Je lui ai dit que j’étais désolée, et ce mensonge m’a donné envie de m’esclaffer. Elle s’est baissée pour chercher sa phalange en pleurnichant comme une mendiante. Sans réfléchir, j’ai poussé le morceau de viande de la pointe du pied. Nous sommes alors toutes deux parties à la poursuite du doigt. Elle à quatre pattes et moi, athlétique. De l’orteil, je l’ai envoyé sous la bibliothèque. Nous gesticulions dans un silence feutré. Puis mon père a fait irruption dans le bureau. Mother avait laissé une traînée de sang sur la moquette et palpait la partie inférieure de la bibliothèque. »


Les propos et les comportements de María deviennent de plus en plus incohérents et violents et tout le talent de Fernanda García Lao consiste à manipuler le lecteur qui, malgré de fausses invraisemblances et d’apparentes contradictions, croyait avoir affaire à un texte linéaire et va se rendre compte peu à peu qu’il y a quelque chose qui cloche… L’incident du piano, l’intérêt de María pour les grandes criminelles, sa fuite à bord d’un camion laitier, son retour en compagnie d’un vagabond laissent présager du pire, mais bien malin le lecteur qui pourra deviner à quel moment s’est opéré le basculement de María dans la folie.
Avec La Faim de María Bernabé, Fernanda García Lao s’impose comme une romancière d’une grande originalité. La confusion du lecteur s’accentue progressivement et les dernières pages, composées d’une série d’annexes, de notes, d’aphorismes, de témoignages et même d’une « Note de l’éditeur » donneront sans doute envie au lecteur déboussolé de relire immédiatement cet étrange roman.





Fernanda García Lao, La Faim de María Bernabé. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Isabelle Gugnon. Éditions de la Dernière Goutte. 18 €

domingo, noviembre 13, 2011

reseña de La faim de MB

09 novembre 2011
CHOUETTAIRE.CANALBLOG
La faim de Maria Bernabe
de Fernanda Garcia Lao
France


"La faim de María Bernabé" de Fenanda García Lao ; 223 p, 19 x 14 cm, octobre 2011, 18 €. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Isabelle Gugnon. Aux éditions la dernière goutte.

L'histoire : Frondeuse, désespérément incomprise et obèse, María Bernabé est une jeune femme hors norme : ses désirs sont décapants, son humour féroce et son intelligence brillante. Mais c’est l’amour absolu qu’elle recherche en malmenant son corps, ce gros animal encombrant, tout autant que les adultes ectoplasmiques et lâches qui l’entourent. Elle mange, elle ingurgite, elle engloutit : c’est sa façon à elle de se révolter contre l’indifférence.

En voulant conquérir une place dans le cœur et le regard des autres, María Bernabé, véritable électron libre, va tout faire pour désintégrer les stéréotypes et le culte du corps. Au risque d’être dévorée par ses propres désirs.

L'auteur: Fernanda García Lao est née en 1966 à Mendoza en Argentine. Contrainte de s’exiler à Madrid avec sa famille en 1976, elle retourne dans son pays d’origine en 1993 et s’installe à Buenos Aires. Comédienne et dramaturge, elle est l’auteur de plusieurs pièces de théâtre ainsi que de nombreuses nouvelles. Elle a également publié plusieurs romans, dont La faim de María Bernabé qui a obtenu, en Argentine, le prix du Fonds national des arts.

 Avis: Un texte à la première personne est toujours une confession.

Ainsi María va se raconter avec violence et sarcasme, avec douleur. L’adolescente  se rend obèse. María se détruit en dévorant, en engloutissant, en mâchant car María a besoin d’amour mais personne ne lui en donne. La petite fille ne réussit pas à contenir ses appétits, la femme abime son être dont le volume n’est qu’excès. Elle se raconte, vue et ressentie de l’intérieur dans un langage fort et des mots durs. Son corps est le champ où se disputent les batailles de son identité, de ses désirs, de la reconnaissance qu’elle recherche désespérément. C'est tout le monde maudit qui rentre par cette bouche. Son corps supporte et reproduit les tragédies de sa vie.

Elle parle de sa famille et de ses relations toujours difficiles avec ses membres. Elle déshabille sans pitié, avec une ironie cruelle, les entrelacs de  leur existence hypocrite, María méprise, María se tait, María dévore.

María vit pour se perdre, pour s’évader de son corps, pour s’en aller, pour se neutraliser, pour échapper à la souffrance et aux sentiments. Ce n’est pas le roman d’une grosse qui aime se bâfrer,elle n'a pas le plaisir de la nourriture mastiquée et avalée. Elle mange avec une compulsion angoissante, María mange pour mourir. Elle engloutit le combustible nécessaire pour atteindre l'éclatement qui la désagrègera en fragments dispersés. Une forme très éloquente de disparaître sans se rendre au silence, une déclaration de guerre et une volonté résolue de résistance à l'invisibilité.

Ce roman possède une violence sordide et très amusante en même temps, ce qui donne un mélange étrange.

Taller en Billar de Letras: Inventario (im)personal

CURSO DE NARRATIVA INTERNACIONAL Comienza con: Fernanda García Lao (Argentina) Inventario (im)personal: Narrar desde los objetos. Memori...